Recolonisation naturelle

Lorsque les opérations de nettoyage s’achèvent, des peuplements ont été altérés, parfois même éradiqués, par les effets directs du pétrole et du nettoyage. Partiellement dépeuplés, les sites touchés se trouvent dans la situation d’ouvrages maritimes neufs. Ils voient s’installer sur eux d’abord des espèces colonisatrices, puis progressivement des peuplements comparables à ceux du milieu environnant. Une crainte est que cette séquence de colonisation se trouve affectée par la subsistance, pendant des mois ou des années, de quantités anormalement élevées d’hydrocarbures dans l’eau et les sédiments. La mise en place de suivis scientifiques, construits pour déterminer s’il y a reconstitution des équilibres d’origine et en combien de temps, a été instaurée dans ce but.

Ces travaux ont montré que les zones les plus affectées par une marée noire de grande ampleur retrouvent des équilibres comparables à celles des zones environnantes dans des délais typiques de :

• 2 à 6 ans pour les zones de faible sensibilité (pointes rocheuses et autres zones battues par les vagues) ;

• 5 à 15 ans pour les zones de sensibilité moyenne (plages et autres zones d’activité hydrodynamique modérée) ;

• 10 à 25 ans pour les zones de forte sensibilité (marais littoraux et autres zones d’activité hydrodynamique très réduite).

Ces durées ne sont pas clairement supérieures à celles que demandent des zones comparables pour compenser intégralement une altération de leurs peuplements due à une catastrophe naturelle, comme une coulée de boue ou une éruption volcanique. Mais il est essentiel de tout faire pour qu’une zone affectée par une marée noire n’en subisse pas une seconde avant d’avoir entièrement récupéré son état initial.

Ainsi, les zones du littoral breton (France) qui ont été touchées successivement par les pollutions du Torrey Canyon (1967), de l’Amoco Cadiz (1978) et du Tanio (1980) ont vécu deux bouleversements d’écosystèmes en phase de récupération. Si la grande majorité de leurs peuplements est revenue aujourd’hui à une situation d’équilibre comparable à celle des zones environnantes, des traces de surabondance d’espèces opportunistes ou de sous-abondance d’espèces sensibles restent encore mesurables dans certains milieux.

Sous nos latitudes, un délai de 6 à 7 ans est généralement suffisant pour faire disparaître presque toute trace d’une grande marée noire. Pas toutes cependant : certains milieux très protégés, tels des marais maritimes et quelques vasières du fond de l’Aber Benoît, où les arrivées de pétrole de l’Amoco Cadiz avaient été massives, restaient encore polluées treize ans après l’échouement du navire.


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